Le constructeur a l'obligation de décrire et de chiffrer les travaux que le maître d'ouvrage décide de réaliser lui-même

Le constructeur a l'obligation de décrire et de chiffrer les travaux que le maître d'ouvrage décide de réaliser lui-même

Publié le : 11/01/2022 11 janvier janv. 01 2022

Le constructeur est soumis à plusieurs obligations envers le maître d’ouvrage lors de la construction d’un immeuble, dont des règles relatives au formalisme sur l’appréciation des coûts des travaux. 

Une société civile immobilière confie la construction de deux immeubles à un constructeur de maisons individuelles. Lors de la réception de l’ouvrage, plusieurs malfaçons sont constatées et il s’avère qu’un certain nombre de travaux réservés par le maître de l’ouvrage, c’est-à-dire des travaux qu’il souhaite lui-même exécuter, étaient sous-évalués, voire non chiffrés par le professionnel du bâtiment.

Or, le Code de la construction et de l’habitation impose au constructeur de décrire et de chiffrer « le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution », en réalisant une « clause manuscrite », qui prend la forme d’une notice descriptive établie sur un modèle type, et qui est insérée en annexe au contrat de construction. 

Cette obligation légale assure au maître de l’ouvrage d’avoir une connaissance complète du coût global des travaux, notamment pour poursuivre la construction des immeubles. En cas de manquement du maître d’œuvre dans la description ou le chiffrage des travaux réservés, celui-ci doit supporter la charge de ces travaux.

Il est à rappeler que la signature et le paraphe du maître d’ouvrage sur la notice descriptive formalisent toutefois son accord sur les travaux qu’il s’est réservé, et dont le constructeur avait connaissance au moment de l’estimation de leur coût.

Dans l’affaire étudiée, le maître d’ouvrage assigne alors le constructeur afin d’obtenir l’indemnisation des désordres sur l’ouvrage et le remboursement du prix des travaux dont il s’était réservé l’exécution.

Les juges recueillent favorablement ces demandes, mais limitent la condamnation du maître d’œuvre aux sommes dues pour réaliser les travaux réservés inscrits dans la notice descriptive, et non à l’ensemble des frais exposés par le demandeur. 

La Cour d’appel apprécie souverainement que certains éléments transmis par le demandeur, comme la facture de pose de parquet flottant et de plinthes, ainsi que des tickets d’achats de fournitures, « ne permettent pas d’établir que ces frais sont afférents aux constructions litigieuses », et que ces frais ne doivent pas être pris en compte pour calculer le montant de l’indemnité.

Le demandeur forme alors un pourvoi en cassation afin d’obtenir une valorisation de son indemnité.

Cependant la Haute juridiction rejette le pourvoi, estimant que si « le constructeur doit [bien] supporter le dépassement du prix des travaux qu’il n’a pas chiffrés [sur la notice descriptive], de manière réaliste », la Cour d’appel, « qui a retenu que des travaux réservés par le maître d'ouvrage étaient insuffisamment chiffrés dans la notice descriptive », a exactement déduit que « le constructeur devait prendre en charge leur coût, déduction faite de celui mentionné dans la notice ».


Si cette décision de la Cour de cassation n’est que la continuité de sa jurisprudence, qui sanctionne lourdement le constructeur en cas de manquement au formalisme d’ordre public d’un contrat de construction d'une maison individuelle avec fourniture du plan, la Cour précise toutefois la limite de sa condamnation, c’est-à-dire aux seuls travaux réservés expressément inscrits dans la notice descriptive, mais qui s’avèrent soit sous-évalués, soit non chiffrés. 

Références de l’arrêt : Cass. civ. 3eme, 10 novembre, n°20-19.323
 

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